Octobre, les
journées rapetissent, les températures diminuent, on observe la
migration des oiseaux et les couleurs changeantes des arbres. Ici, on
prolonge encore un peu l'été indien avec Pascal, son sourire et ses
légumes du soleil. J'ai rencontré Pascal au café villageois de
Lauris, au sud du parc régional du Luberon, là où tous les jeudis
soirs se réunissent les petits producteurs bio du coin, étalant
humblement et fièrement les produits nés de leurs mains et de la
Terre, comme du pain au petit épeautre et au levain (fermentation
lente, garantie sans mal de ventre), du fromage de brebis happy, un
bon vin rouge pour accompagner tout ça et même des huiles
essentielles de plantes récoltées sauvagement mais respectueusement
dans notre cher Luberon. Et puis bien sûr, il y a toujours les
fruits et légumes de saison, colorés, vitaminés et savoureux.
Plusieurs maraichers proposent différents légumes et au sein d'une
espèce on retrouve des variétés différentes, adios les tomates
fades, les hybrides brillants et ennuyants, hola les aubergines
violettes, blanches, vertes et les variétés anciennes (non, on ne
veut pas vous oublier!). Vive la biodiversité ! Le marché
donne sur un jardin des rêves en permaculture, la buvette est
voisine, la bonne ambiance toujours présente. D'ailleurs, qui dit
marché dit rencontres, échanges de recettes et convivialité, une
fois Pascal qui préparait une jolie cagette de légumes d'été me
donne sa recette de ratatouille (dont le secret est révélé un peu
plus bas).
Quelques semaines plus tard, nous voilà dans sa cuisine à
préparer le fameux plat en question. Mais avant ça, Pascal m'ouvre
les portes de son jardin, une serre qui ressemble plus à une jungle
luxuriante qu'à une succession de rangées proprettes et ça, ce
n'est pas pour me déplaire, au contraire ! Les « mauvaises
herbes », les araignées et les nombreux insectes tiennent
compagnie aux légumes, le maraicher dispose même des offrandes de
tomates abimées pour rasasier les campagnols affamés
et garder les autres légumes entiers. Les auxiliaires améliorent la
terre et se régalent des «nuisibles », les fleurs charment
les mellifères, le lieu est fertile et harmonieux. On
commence par cueillir les tomates, vertes, jaunes, oranges, rouges,
zébrées, dégradées, rondes, allongées, cornues, un vrai plaisir
visuel et olfactif. On avance dans la serre parmi les plants serrés,
écartants les feuilles, cueillant les fruits et légumes gorgés de
soleil, cultivés avec amour. Et cela fait toute la différence comme
dit Pascal, lorsqu'on porte toute son attention à ses plantes, qu'on
les bichonne, la bonne énergie est transmise aux végétaux, et
sûrement aussi à ceux qui les dégustent par la suite. Cela fait
tout juste un an que Pascal cultive en tant que maraicher et quelle
joie pour lui de récolter le fruit de son travail. Il privilégie
les variétés anciennes qui donnent des descendants fertiles
contrairement aux hybrides qui nous rendent complètement dépendants
des grands groupes internationaux pouf leur racheter des semences
d'année en année, les variétés anciennes ont également
l'avantage d'être plus résistantes et moins exigeantes en apports
organiques, ils sont non seulement plus robustes mais également bien
plus goûteux. D'ailleurs, Pascal a été incité à planter des
hybrides tomates coeur de bœuf et l'aubergine qu'on retrouve dans
les supermarchés, « juste au cas-où » mais il s'avère
que ses plants de tomates et aubergines anciennes sont bien plus
productifs. Et pour de beaux légumes, il faut un sol en bonne santé,
le jeune maraicher a d'ailleurs suivi une formation sur la
conservation des sols et non sur le maraîchage en lui-même. Un
parcours assez inhabituel, Pascal sourit à la vie et la vie le lui
rend bien.
Après la récolte, on passe à la cuisine avec un panier bien rempli. Tomates, aubergines, courgettes, poivrons, oignons, des saveurs d'été, avec lesquelles le maraicher prépare une ratatouille (mais parfois la vie nous surprend et le plat se transforme… ahaha). Son secret est de pré-cuire chaque légume séparément avant de tous les rassembler pour terminer la cuisson, afin de conserver les arômes de chaque légume. Enfin, je dis son secret, mais à vrai dire Pascal avait l'habitude de laisser mijoter tous les légumes ensemble, mais c'est une amie qui lui a confié ce petit truc et on s'est donc lancé dans cette longue préparation tous les deux pour la première fois, je me retrousse les manches et on cuisine dans la bonne humeur, en prenant le temps. Après avoir soigneusement découpé tous les légumes, pressé le jus sucré des tomates, brûlé les aubergine au four, puis en cuire de nouvelles à la poêle (oui ici, c'est de la vraie cuisine avec les incidents de parcours de la vraie vie qui vont avec), confit les oignons à la confiture de roses (récoltées et transformées par Pascal lui-même), rassemblé les légumes pour terminer la cuisson, on goûte, curieux, et oh surprise cela ne ressemble pas aux saveurs d'une ratatouille, c'est plus chaud, plus sucré, presque confit, très légèrement épicé (les poivrons ont un petit truc pimenté), méditerranéen certes mais avec une forte tonalité orientale. Un délice qui fond en bouche, voici la recette.
Légumes du soleil,
un petit goût du Maghreb
- 1,5 part de tomates : andines cornues, green zebra, carotina, golden jubilée, noire de Crimée, black pineapple … ou toutes les autres tomates anciennes cultivées avec amour que vous trouverez
- 1 part d'aubergines : louisiana et imperial black beauty
- 1 part de courgettes : petites, jaunes et vertes, en fleur ou pas
- 1 part de poivrons : cornes de taureau pour un petit goût épicé
- 1 part d'oignons : rossa di longa, blancs, rouges
- une ou deux gousses d'ail
- confiture de pétales de roses (ou miel)
- huile d'olive
- sel, poivre
Couper les tomates en gros dés, les aubergines en rondelles, les courgettes en bâtonnets, les petits poivrons égrainés en deux, hacher les oignons.
Faire suer les oignons dans de l'huile d'olive, ajouter de l'eau jusqu'à absorption, répéter l'opération de nombreuses fois, puis ajouter la confiture de pétales de roses (ou du miel) à la dernière minute pour caraméliser les oignons.
Enfourner les poivrons à 200°C pendant 20 minutes, plus ou moins, selon vos poivrons.
Presser les tomates découpées pour récupérer le jus et le réserver. Les faire revenir à feu doux.
Saler les rondelles d'aubergines et les faire revenir. Faire revenir les courgettes en les gardant bien croquantes.
Mélanger tous les légumes et terminer la cuisson dans un fait-tout. Saler, poivrer, déguster.
Riz pilaf coloré
- riz
- jus des tomates
- un peu de curry
- sel, poivre
À feu doux, verser le riz dans une poêle et arroser d'un peu d'huile d'olive. Bien mélanger jusqu'à ce que les grains deviennent translucides, ajouter le jus des tomates. Remuer régulièrement jusqu'à ce que tout le jus soit absorbé. Si besoin allonger avec de l'eau, saler, poivrer, épicer légèrement au curry, remuer régulièrement jusqu'à ce que le riz soit cuit et presque sec. Servir bien chaud pour accompagner les légumes du soleil.
Cet article commence à devenir long, j'espère que cette rencontre avec Pascal et son petit coin de paradis vous a plu et que cette recette vous apportera un peu de chaleur durant ces longues soirées d'automne. Les fleurs d'hibiscus étaient la jolie surprise le jour de notre récolte, Pascal les transforme pour faire une boisson africaine: le bissap.
Waouh, un très bel article et une jolie rencontre :) Toutes ces couleurs donnent envie de se faire un bon petit plat! Je testerais la recette de la ratatouille :) Et bravo pour les photos!
RépondreSupprimerMerci Camille, des compliments de ta part, ça a beaucoup d'importance pour moi!
SupprimerTrès beau reportage qui donne envie de cultiver ses propres légumes !Figure toi que j'avais en effet lu qu'il fallait cuire les légumes de manière séparée, je pense que cela évite que les aubergines et courgettes soit envahis par l'eau des tomates, mais je t'avoue que par flemme, je cuis le tout ensemble :) Depuis peu de temps, je change et je les fais cuire en cocotte en terre dans le four et c'est mieux !
RépondreSupprimerJ'adore la photo des courgette avec leur fleur, ma mère a une recette à se damner de fleurs de courgettes farcies...
C'est ce que j'aime avec la cuisine, chacun a sa façon de préparer un plat, on retrouve tellement de variantes, chacun a son petit secret et son petit truc en plus. Tu me donnes l'eau à la bouche avec tes fleurs de courgettes farcies (et vive les tempura) !
Supprimeret au fait j'aime beaucoup ton nouveau thème de navigation !
RépondreSupprimerQuelle profusion dans ce jardin!
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